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C’est un ingrédient fondamental dans la plupart des cocktails classiques, mais qu’est-ce que le vermouth?
Le vermouth (vermut en italien) ou vérmot (en piémontais), est un vin blanc enrichi en alcool et parfumé aux épices et herbes, parmi lesquels l’absinthe indispensable.
C’est du nom allemand de cet ingrédient (wermut) qu’Antonio Benedetto Carpano, dans son établissement turinois en 1786, décida de s’inspirer pour baptiser sa création. En réalité, il est risqué de parler de création, puisque l’histoire des vins aromatisés se perd dans la nuit des temps. En effet, on trouve les premières traces dans les textes d’Aristote en Grèce, mais c’est seulement sous l’Empire Romain, au Ier siècle après J.-C. , qu’ils connurent leur apogée. A cette époque, l’alcool ne faisait pas encore partie de la recette, le vin était parfumé au miel, aux fruits, à l’absinthe et était servi par la noblesse romaine, dont Cicéron, à leurs invités. Depuis, la qualité n’a cessé de s’améliorer, également grâce, et enfin, à l’ajout d’alcool, qui a une plus grande capacité d’extraction des arômes que le vin. Dans le ‘500 apparaît le “De Secreti”, un livre dans lequel l’auteur, au cours de ses voyages à travers l’Europe, transcrit de nombreuses recettes de médicaments et de décoctions impliquant l’utilisation de vin et d’herbes aromatiques; ce travail a apporté une contribution importante à l’élaboration de ces vins.
Le vermouth doit également son succès au traité que l’Angleterre a conclu avec le Portugal, à la suite de la guerre de 1701 contre la France. Ce traité a rendu presque impossible pour les commerçants anglais d’importer du vin français, et qui ont donc dû ouvrir de nouvelles routes commerciales. Bien sûr, le produit phare était les précieux vins fortifiés portugais, mais cette nouvelle mode a ouvert la porte à des produits tels que Marsala et à des expériences telles que le vermouth, qui permettait d’utiliser et de commercialiser des vins jeunes. Ces vins, grâce à une utilisation judicieuse des épices et les herbes, étaient rendues beaucoup plus appréciables, et vendues à des prix bien inférieurs; ce qui est non négligeable. Le cépage utilisé à l’origine était le Moscato, facilement disponible et à des prix très abordables, qui, grâce à son haut taux en sucre résiduel, permettait de réduire, sinon d’éviter, l’ajout du sucre lui couteux. Mais avec le succès des vins effervescents, le Moscato est remplacé, en tout ou en partie, par des raisins Cortese, Arneis ou Trebbiano. À ce jour, les entreprises qui utilisent encore le Moscato le font avec un maximum de 30% et le mentionnent avec fierté sur l’étiquette (comme un gage de tradition).
La méthode de production a changé plusieurs fois. Au début, le vin été ajouté immédiatement avec de l’alcool afin d’atteindre une teneur en alcool d’environ 20 degrés, et dans cette solution, les épices et les herbes étaient infusées dans des fûts pour tout l’hiver. Au printemps, il était ensuite mis en bouteille et laissé au repos pendant 6 mois. Plus tard, a était décidé de ne mélanger les deux ingrédients qu’après l’infusion; cependant, la question s’est posée de savoir dans lequel des deux procéder à cette étape. Dès lors, deux écoles se sont opposées, mais la solution la plus populaire était l’infusion en alcool; néanmoins, la méthode n’a pas eu l’unanimité. Le choix était entre procéder à infuser les arômes individuellement, puis les assembler selon la recette de chaque fabricant, ou alors une seule infusion en ajoutant, progressivement, les ingrédients en fonction du temps d’infusion optimal pour chacun d’entre eux. L’alcool est ensuite filtré, ajouté au vin et sucré. Cette dernière phase détermine la couleur du vermouth: avec un sirop clair on obtient le blanc, avec le sucre brûlé un produit ambré, enfin, avec l’ajout de caramel, et une petite partie de vin rouge, on obtient le vermouth rouge.
La tradition du vermouth a commencé à Turin, puis s’est rapidement répandue dans toute l’Italie et la France voisine, mais nous en parlerons dans les prochains articles.
Michele Crippa
Maître d’hôtel, Lucas Carton Paris
Yann Lecaplain
8 Gennaio 2021 at 10:18
Merci Michele pour ces articles toujours aussi intéressants et qui participent merveilleusement à la diffusion d’un autre aspect plus méconnu de la culture de l’Italie.
Je crois qu’il y a une petite coquille de typographie dans la phrase : « permettait de réduire, sinon d’éviter, l’ajout du sucre lui gouteux » et qu’il faut lire, à mon avis, « Coûteux ».
Merci encore.
Yann lecteur assidu et attentif. -:)