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Storie - Histories

“Dogma datur christianis, quod in carnem transit panis, et vinum in sanguinem”

Giovanni Curcio

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En 476 ap. J.-C. Odoacre, à la tête de la rébellion contre Oreste, vainc les troupes romaines et prononce la déchéance le dernier empereur Romulus Auguste. C’est la fin d’une époque et le début d’une autre.

Une chose que nous devons à l’Empire romain, c’est l’unification des cultures mais surtout des consommations.  Partout dans l’Empire, on retrouvait dans les rues des marchands de vin et nourriture vendant la même les mêmes choses. Avec l’arrivée de nouveaux peuples et rois; Rome change et avec elle l’Europe.

Les vignes sont cultivées un peu librement, les lois portent sur des sugets plus urgents et importants que définir un vignoble ou comment faire le pain. Chacun est plutôt libre et les moines commencent à étudier assez timidement, la vigne. Malheureusement les différentes guerres et pillages qui suivent, font perdre les traditions romaines installées. 

Non pas que ces traditions fussent excellentes, au contraire, les Romains ont imposé une culture de la vigne en aval. Cette discipline on la retrouvera dans certains vestiges du vignoble à Gevrey-Chambertin (il suffit de regarder les vignobles d’Italie). En plus de cela, les nouveaux cultivateurs du vignoble deviennent les moines irlandais, qui utilisent de vieilles habitudes germaniques. Autrement dit, cultiver sur les pentes des collines et non en aval. Si la rivière n’est pas loin, c’est encore mieux (d’où les constructions citadines au bord de l’eau). 

En quelques siècles, les gaulois , d’abord germaniques puis francs, ont découvert que les barriques avaient une double utilisation; le vin pouvait y être transporter, mais aussi conserver plus longtemps afin de le bonifier. L’amphore est définitivement abandonnée. 

Les goûts n’ont cessé d’évoluer. Le christianisme avait amené une régression dans certains domaines comme le militaire et l’artistique, mais avait changé la consommation en la projetant vers la modernité.

Le Posca (boisson romaine à base de vinaigre) était considérée comme répugnante et les goûts se tournèrent de plus en plus vers un vin plus ” propre”.  Un vin sans ce goût de vinaigre s’installe (en réalité ce sera très compliqué à gérer au fil des siècles). S’ajoute, qu’en plus d’être vendu, le vin valait plus que l’argent même (les invasions barbares provoquent une inflation très volatile) et qu’il était donc préférable de le conserver. 

Justement l’apprentissage de la conservation consistait à mettre en fût, où étaient ajoutés des vins très forts en alcool afin de les couper. Ainsi est née la modification à des fins commerciales. Alors que les Romains modifient le vin avec des épices et du miel, la postérité le modifie pour des raisons commerciales. Malheureusement, comme toutes les altérations, tôt ou tard, l’exagération pour le profit amène à la dégradation par rapport au goût du vin.

Les bastions du vin de qualité seront les premiers monastères (ou plutôt les communautés chrétiennes mieux organisées). De vraies études naissent sur la vigne, comme sur la bière. Les moines d’avant et le monde qui célèbre la messe en latin, affirment une chose:

“Dogma datur christianis, quod in carnem transit panis, et vinum in sanguinem” (LA)

“Un dogme est donné aux chrétiens: le pain se transforme en chair et le vin en sang” (Thomas d’Aquin, hymne Lauda Sion Salvatorem)

Tout cela jusqu’à Martin Luther.

La logique calviniste, qui rappelait davantage la pensée aryenne (rien à voir avec la race aryenne!), disait que la vie  était le résultat de transsubstantiation et donc que le vin aussi pourrait être transformé. Dès lors est né un fossé culturel entre le peuple catholique, c’est-à-dire le vin robuste, fruit de la vigne et de la main de Dieu, et la vision nordique et calviniste (ou luthérienne) où l’homme a le droit d’intervenir.

La vision ecclésiastique contre l’aspect pragmatique de puritains. Le contraste entre ceux qui ont un climat et un paysage qui facilitent la culture de la vigne, et ceux qui ont besoin de se battre pour en obtenir quelques résultats.

Je parle de tout cela parce que jusqu’à il y a quelques années, c’était la bataille entre l’ancien monde (l’Italie, la France et l’Espagne essentiellement) et le nouveau monde.

Je me rappelle bien de la vision différente sur le bois (vanillé ou pas), les bouchons (à vis ou liège), l’intervention de l’homme pour irriguer ou non…

En revanche, ce que je me demande est la chose suivante: avec les températures et les changement de climat futurs, aurons-nous peut-être besoin de profiter de cette praticité qui manque à nous, peuples du sud de l’Europe? Aurons-nous enfin une vision convergeante pour la consommation comme l’a connu le monde romain?

Giovanni Curcio

Adaptation par Mathias di Lauro Sanseverino

Sommelier de l'année 2022 Gault&Millau Luxembourg

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